Billet printanier par René Barjavel

Si j’étais Dieu, je viendrais en France au printemps. Je choisirais le Bourbonnais à cause de la douceur de ses collines où l’on a envie de promener sa main comme sur une femme.

(C) Earth, by Hipgnosis CC BY 2

Je me poserais dans l’herbe d’un pré, sans ma barbe ni ma croix, sous l’apparence d’un enfant. Et je ne pèserais pas plus qu’un papillon, pour ne pas faire souffrir l’herbe déjà haute et encore tendre. Je m’assiérais au milieu d’elle en la priant de m’excuser. Elle serait ronde autour de moi, et droite de ses mille fois mille lances toutes semblables dont aucune n’est pareille. Je la caresserais de la paume de mes mains dans lesquelles elle serait fraîche comme le nez d’un chien. Je serais pareil à un enfant qui n’a encore jamais vu de fleurs, et chaque année, à chaque printemps, chaque fois je découvrirais de nouveau l’émerveillement du narcisse et du bouton d’or. Dans le pré voisin il y aurait une vache blanche qui me regarderait. Elle saurait qui Je suis et ne serait pas étonnée. Entre ses yeux et les miens, et sur l’herbe et les collines, et aux cimes des peupliers qui vont en rang et accueillent le gui et les corneilles, passerait, avec simplicité, l’amour. Je serais heureux comme un Dieu.

Vous pouvez l’être aussi.

Partout.

René Barjavel, Si j’étais Dieu

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